E x t i m e (journal)

mercredi 10 février 2016

Ersilie, ville et fils

" A Ersilie, pour établir les rapports qui régissent la vie de la ville, les habitants tendent des fils qui joignent les angles des maisons, blancs,ou noirs, ou gris, ou blancs et noirs, selon qu' ils signalent des relations de parenté, d'échange, d'autorité, de délégation. 


Quand les fils sont devenus tellement nombreux qu'on ne peut plus passer au travers, les habitants s'en vont : les maisons sont démontées ; il ne reste plus que les fils et leurs supports.
Du flanc d' une montagne, ou ils campent avec leurs meubles, les émigrés d' Ersilie regardent l'enchevêtrement de fils tendus et de piquets qui s' élève dans la plaine. C' est là toujours la ville d'Ersilie ; et eux même ne sont rien.



Ils réédifient Ersilie ailleurs. Avec des fils ils tissent une figure semblable qu' ils voudraient plus compliquée et en même temps plus régulière que l' autre. 

Puis ils l' abandonnent et se transportent encore plus loin, eux- même et leurs maisons.


Ainsi en voyageant sur le territoire d' Ersilie ; tu rencontres les ruines des villes abandonnées, sans les murs qui ne durent pas, sans les os des morts que le vent fait rouler au loin : des toiles d' araignée de rapports enchevêtrés qui cherchent une forme."


Italo Calvino - Les Villes invisibles 






illustrations : Amy Casey






Spéciale dédicace à Ktoo pour son ambition de création sur le "fil" ...

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