E x t i m e (journal)

dimanche 13 juillet 2014

Bernard Tschumi

 " Dans l'idée de notation, il y avait deux choses différentes. La première était une question de langage : si vous voulez changer quelque chose, il faut parfois changer la manière d'en parler. Quand Wittgenstein et Jameson parlent de la prison-house du langage, c'est parce que si l'on utilise des axonométries en architecture, inévitablement nous allons avoir des œuvres qui procèderont des axonométries. Par conséquent, il faut se poser la question de la langue qu'utilise l'architecte. C’est la première question, valide encore aujourd'hui lorsque l'on travaille en numérique. L'utilisation du numérique va-t-elle nous permettre de changer l'architecture, ou va-t-on refaire la même chose mais en ajoutant des surfaces à double courbure ?

La notation vise également à documenter ces aspects qui n'avaient jusque-là pas été mis en avant dans l'architecture, c'est-à-dire le mouvement des corps dans l'espace, l'action, les conflits. Quand on est architecte, on reçoit des programmes avec tant de mètres carrés de ceci ou de cela. Ces mètres carrés reflètent des raisons souvent culturelles. La littérature se situe directement dans la culture qui, elle, va influencer notre manière de penser. Je me suis dit : « Au lieu de donner des mètres carrés à mes étudiants, je vais leur donner des extraits de textes. » […] 


 Un jour, je tombe sur deux petits ouvrages intitulés Film Form et The Film Sense d’Eisenstein. Pour les besoins d'Alexandre Nevski, il imagine un mode de notation où sont inscrits parallèlement les cadrages, les mouvements de la caméra dans leur propre temporalité, la musique et le mouvement des acteurs. Un peu comme une partition musicale. Ce fut une révélation parce que c'est une manière très organisée de parler d’architecture, non seulement de l’espace en plan ou en coupe, mais également à travers le mouvement des corps dans l'espace. C'est-à-dire en ajoutant une dimension qui rende compte de la réalité complexe de l'architecture. […] "


Extraits de l'entretien de Bernard Tschumi avec Frédéric Migayrou et Aurélien Lemonier, commissaires de l'exposition qui lui est dédiée au
 Centre Georges Pompidou - 30 avril / 28 juillet 2014

Ah ! l'armoire en bois massif des grands parents ...


Amélie :
"Je suis allée voir le médecin. J'étais enceinte. Quand il m'a annoncé la nouvelle, j'ai fait semblant d'être heureuse... comme il se doit. Puis je suis rentrée chez nous. Je n 'ai rien dit à Armand. J'aurais aussi bien pu lui dire, mais j'ai choisi de ne rien dire. J'ai pensé à nous deux, à notre histoire. J'ai continué à me taire. Je me suis posée un tas de questions. Est-ce que j'aimais Armand ? Est-ce qu'avais envie d'avoir un enfant de lui ? est-ce que j'avais envie d'avoir un enfant ? Est-ce que j'étais capable d'aimer quelqu'un ? Je savais répondre à aucune de ces questions. Je me suis détestée pour ça. Armand ignore qu'aujourd'hui je suis allée à la clinique. Il ne sait pas ce que je viens de faire. " 

Armand :
" Je voyais bien que depuis quelque temps ça n'allait pas. Amélie n'était plus que l'ombre d'elle même. Je l'ai questionnée un peu plus formellement que d'habitude. Je voulais savoir ce qui nous arrivait. Elle s'est mise à pleurer. C'était la deuxième fois que je la voyais pleurer. Et puis, elle m'a tout raconté. Elle m'a demandé si j'aurais voulu le garder. Ce n'était pas la question. La question c'était pourquoi elle n'avait rien dit ? Elle savait pas pourquoi. elle savait plus rien. J'ai crié que c'était dégueulasse d'avoir fait ça, elle a continué à pleurer. J'ai tapé fort contre l'armoire en bois massif de ses grands parents, j'avais très mal au poignet, euh, je lui en voulais, j'en voulais à l'armoire, j'en voulais à ses grands parents. Je suis parti. J'ai marché pendant deux heures. Et puis la nuit a fini par tomber. "

Arman Hors saison , film de Sébastien Betbeder .2013. (version courte de : 2 automnes 3 hivers)