E x t i m e (journal)

dimanche 28 décembre 2014

100

Pour ce cent(ième) article de l'année 2014, ce sera sans. / Néanmoins, sans sang, l'hémoglobine c'était au 99 /

 Juste la mer et le ciel, pris en photo aujourd'hui même. 
                                   À  l'année (toute) prochaine ! ...



jeudi 18 décembre 2014

Instant


« Le temps n'a qu'une réalité, celle de l'instant. Autrement dit, le temps est une réalité resserrée sur l'instant et suspendue entre deux néants. »

Gaston Bachelard,
 L'intuition de l'instant.

samedi 13 décembre 2014

O in motion

"Ce à quoi ressemblent nos corps et comment ils interagissent avec le monde structure nos manières de penser" Georges Lakoff

Il faut savoir naître à chaque instant. Si vous voulez devenir un grand danseur, le but n'est pas de viser la performance ou l'esthétique.
Il faut avoir le courage de ne pas aller vers la performance. 
Il faut avoir le courage de pouvoir accueillir tout ce qui peut se produire, tout ce qui est potentiel (...) 
le o in motion c'est le courant porteur dans lequel on se sent quand on réalise des choses sans effort, léger.

Miles davis disait" n'ayez pas peur des fausses notes, elles n'existent pas" En réalité, toutes les "erreurs" sont un futur qui essaie de se manifester. Et c'est ce que les danseurs essaient de trouver. Nous, ce qu'on se dit c'est qu'on danse avec le chaos...

Extrait de la conférence  "Vous êtes tous danseurs, mais vous l'ignorez" de Ucka Ludovic Ilolo 

dimanche 7 décembre 2014

Envergure/Tension - Rupture/Relâchement

La danse c'est beau quand il y a de l'envergure, de la tension et du relâchement après la rupture.
L'instant magique est celui d'avant la rupture (du mouvement poussé à l'extrême).

Comme un fil qu'on étire, étire, étire et qui, suspend le temps, juste avant qu'il ne rompe.
Et là, il cède, il lâche et se lâche dans un mouvement fugace et complexe décrivant des courbes folles et aériennes.



« Je veux chercher le mouvement jusqu’à la limite, comme un funambule, marcher sur le fil. Cette sensation du vide : où est-ce que je ne suis plus rien ? Je le recherche, peu importe avec qui je travaille. »  Louise, danseuse, compagnie Lalala Human Steps.

vide - déséquilibre - (en)vol ...

Une notion de risque en quelque sorte.

Edouard Lock, chorégraphe : « Un jour, on fera des chorégraphies sans gravité et on se demandera comment on arrivait autrefois à créer des chorégraphies où chaque saut entraînait une chute.»


Lorsque la sculpture, l'architecture ou la musique y parviennent aussi ( à ce quatuor : envergure - tension - rupture - relâchement) ça remue les tripes, forcément ( force aimant ! )



[Edouard] Cook (Américain) dans le saut à la perche, 1er août 1908 [J.O. de Londres] : [photographie de presse] / [Agence Rol] - 1
Edouard Cook, saut à la perche, 1er août 1908 [J.O. de Londres]




Racines

Comment voulez-vous que j'ai les pieds sur terre ?
Mes racines sont dans l'eau ! 



mercredi 3 décembre 2014

Le geste primitif de l'enfant de 3ans1/2 ...



"une maison" selon J., 3ans 1/2" décembre 2014
Cairn de Barnenez, chambre funéraire 4500 av. J.-C.
nota : malgré les 6500 qui les séparent, une troublante ressemblance ... dessin réalisé "à l'instinct" sans aucun lien (photo ou in situ) avec le monument. 

Lien : le geste primitif de l'architecte

lundi 1 décembre 2014

Lisière


La lisière c’est la zone de frottement entre deux espaces.


En général, c’est une limite entre forêt et champ. Au loin fermant l’horizon : la forêt, et en avant la zone défrichée pour être cultivée. Le champ est lumineux. La forêt c’est l’obscurité, l’habitat des « génies de la forêt », la zone où on rejette des craintes, des peurs et des pierres.



J’ai toujours été fasciné par ce type de paysage. Quand on est au bord d’un champ on peut apprécier assez facilement les premières dizaines de mètres parce qu’on peut se projeter en parcourant cette distance. Après c’est une étendue indéfinie. On ne retrouve visuellement quelque chose de palpable qu’au niveau de cet écran qui vient fermer le paysage. J’ai toujours pensé que la vie consistait à avancer dans cet espace et à découvrir petit à petit en avançant dans une étendue indéfinie la matérialité des choses. Et puis on arrive au bout, dans un « au-delà ». La disparition.



Un jour une amie architecte m’a dit que la lisière peut aussi être parcourue en la longeant, comme un funambule. L’image m’a beaucoup plu et je me suis imaginé sur un câble tendu juste à la lisière de la forêt, avec un balancier permettant de me maintenir l’équilibre. Un côté du balancier se trouve dans le grand jour et l’autre dans l’obscurité. J’avance porté par l’ombre et à la lumière



Ce qui évoque la peinture de Rembrandt. En effet, ce qui fait la lumière très particulière de ses œuvres, c’est une façon (avec une technique très originale) de faire vibrer de la lumière dans l’ombre et d’introduire de l’ombre dans la lumière. On n’est loin d’une dialectique simpliste.




LISIÈRE

Extraits d’un entretien de Jean-Pierre Brazs


" Je m’intéresse aux limites plus qu’aux choses ou aux lieux eux-mêmes. Aux limites et aux liens : il m’arrive souvent quand j’interviens dans un lieu de créer des passerelles avec d’autres interventions dans d’autres lieux. Ce qui est entre les choses, les lieux, les mots, est peut-être plus intéressant que les choses elles-mêmes. "



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Talvera 1, 1987



dimanche 23 novembre 2014

Paul Eluard

M&Mme Rêve - Pietragalla / Derouault



Forme tes yeux en les fermant.
Donne aux rêves que tu as oubliés
la valeur de ce que tu ne connais pas.

J'ai connu trois lampistes,
cinq garde-barrières femmes,
un garde-barrière homme.
Et toi?

Ne prépare pas
les mots que tu cries.
Habite les maisons abandonnées.
Elles n'ont été habitées que par toi.

Fais
un lit de caresses
à tes caresses.

S'ils frappent
à ta porte,
écris
tes dernières volontés
avec la clé.

Règle ta marche sur les orages

Vole
le sens
au son,

il y a des tambours voilés
jusque dans les robes claires.

PARLE SELON LA FOLIE QUI T'A SÉDUIT.

Fais-leur la surprise de ne pas confondre
le futur du verbe avoir avec le passé du verbe être.

Couche-toi,
lève-toi
et maintenant couche-toi.

Aie l'âge de ce vieux corbeau qui dit: VINGT ANS

CoRRige Tes parentS

Veux-tu avoir à la fois le plus petit et le plus inquiétant livre du monde?
Fais relier les timbres de tes lettres d'amour et pleure,
il y a malgré tout de quoi.

Ta liberté
avec laquelle
tu me fais rire
aux larmes
est TA LIBERTÉ

Tu prends la troisième rue à droite,
puis la première à gauche,
tu arrives sur une place,
tu tournes près du café que tu sais,
tu prends la première rue à gauche,
puis la troisième rue à droite,
tu jettes ta statue par terre et tu restes.

Fais-moi le plaisir
d'entrer et de sortir
sur la pointe
des pieds.

Ne garde pas sur toi ce qui ne blesse pas le bon sens



Paul Éluard
Le jugement originel (extrait) L'Immaculée conception, 1930




samedi 22 novembre 2014

Baldaquin


Lit HI-CAN, 

design de Edoardo CARLINO 



Ou comment revisiter le lit à Baldaquin...

Avec une commande centrale totalement autonome, vidéo projecteur et enceintes intégrées et des parois et un écran rétractables, HI-CAN permet de visionner des films, surfer sur internet ou encore écouter de la musique. Un véritable cocon technologique

mercredi 19 novembre 2014

Emulsion


Samedi 15 novembre 2014 : 


Conversation avec K-too à propos de la nécessité d'émulation (intellectuelle) entre 2 partenaires.

Lapsus de K-too : "(...) il faut qu'il y ait une émulsion avec l'autre ..."
J'adore !
Fou-rire !
Lapsus révélateur ou pas ? Oups !

Voyons Wikipédia : Une émulsion est un mélange intime de deux substances liquides. Ce sont toujours deux liquides qui en situation normale sont non miscibles(qui normalement ne se mélangent pas), comme l’eau et l’huile, mais qui vont par des opérations spécifiques (agitation, mélange, ajout de quelques principes actifs) réussir à avoir un aspect macroscopiquement homogène, mais microscopiquement hétérogène. L'une des substances sera donc dispersée dans la seconde substance sous forme de petites gouttelettes. Le mélange reste stable grâce à un troisième ingrédient appelé émulsifiant (cinétique quasi nul, vitesse d'évolution du mélange)."




Wikipédia, encore : 
" Les émulsions naturelles :
  • Le lait 
  • Des latex végétaux, en particulier, ceux de l'hévea brasiliensis (qui donne le caoutchouc naturel) et du castilla elastica 
  • Le film hydrolipidique est un mélange de sébum et de sueur. C'est une émulsion qui protège la peau."
Tiens, tiens, le latex ... comme par hasard ! Hein K-too, en souvenir de tes/nos années 90 ?




Spéciale dédicace à mon amie K-too en souvenir de ce subtil moment !





Et pour faire le lien avec Phase (être en)


Wikipédia, toujours : Une émulsion est un cas particulier de colloïde. Les deux substances liquides en présence sont appelées des phases. Une phase est continue. L'autre phase, discontinue, est dispersée dans la première phase sous forme de petites gouttelettes. Les émulsions sont souvent composées d'une phase aqueuse, semblable à de l'eau, et d'une phase huileuse, semblable à de l'huile.
  • Une émulsion huile dans l'eau (H/E ou O/W pour oil in water) est composée d'une phase huileuse dispersée dans une phase aqueuse. Il s'agit d'une émulsion « directe ».
  • Une émulsion eau dans l'huile (E/H ou W/O pour water in oil) est composée d'une phase aqueuse dispersée dans une phase huileuse. Une émulsion E/H est plus grasse au toucher, car le toucher correspond majoritairement à la nature de la phase externe. Une telle émulsion est dite « inverse ».
On peut également trouver des émulsions multiples H/E/H ou E/H/E"








lundi 10 novembre 2014

Le geste primitif de l'architecte

 " le geste primitif de l'architecte " ?
C'est ce dessin simple mais explicite et bavard comme peuvent l'être les peintures rupestres.
C'est celui dont on peut dire après coup (donc après réalisation), que tout y était, tout était déjà dit.


Il me semble que ceux, dont on s'accorde à dire qu'ils sont de "grands" architectes - et ce, quelque soit leur écriture architecturale - ont ceci de commun qu'ils s'en tiennent à leur idée première et la réalisent fidèlement.
Ils parviennent à faire de ce premier geste, de ce premier coup de crayon, de ce premier jet, une réalité construite.

Alberto Campo Baeza évoque le penser avec les mains :
"Todos ellos, siendo muy diferentes entre sí, tienen en común ese “pensar con las manos” que es la lógica consecuencia de su decidida voluntad de hacer de la arquitectura una idea construida." 

Louis Kahn parle d'intuition :
"Tout ce que nous désirons créer trouve son commencement dans la seule intuition. C’est vrai pour le savant. C’est vrai pour l’artiste. Mais je mis le jeune architecte en garde : s’en tenir à l’intuition loin de la Pensée signifie ne rien faire." 

Le Corbusier, lui, de sentiment :
"Avant la naissance même du raisonnement, le sentiment surgit qui porte à l’acte : la raison donne ensuite ses aises à l’esprit par diverses confirmations qui semblent indiscutables." 
Et tous deux évoquent la pensée, le raisonnement ( le rationnel ?) comme prolongement à cette "intuition-sentiment". Oui, il faudra cogiter / travailler pour que de ce simple geste né d'une idée pure, aboutisse une construction bien réelle. Enorme enjeu. 


D'où leur vient donc cette intuition de départ ? difficile de répondre mais on peut formuler une autre question :
Comment l'architecte décèle-t-il le potentiel de ce premier jet et s'en auto-persuade-t-il ? D'où lui vient cette conviction que "c'est ça qu'il faut faire" ? c'est là que prend toute la force du mot sentiment : c'est quelque chose intimement ressenti. Une intime évidence.
Sommes nous tous aptes à avoir à cette "bonne" intuition ou bien faut-il juste en être conscient ou juste être confiant (se fier à ) en soi-même ?

Certains parlent de concept, mais ça n'a rien à voir avec ce que j'appelle "le geste primitif". 
Le concept  résonne  pour moi comme un "ready made" quelque chose  de déjà "tout prêt" à l'avance, d'abstrait, de figé en quelque sorte. c'est quelque chose qui peut nourrir la réflexion mais qui n'est pas à l'origine du projet.
Alors que le premier jet intègre, et l'intervention elle même et son rapport au lieu, dans une certaine dynamique. Bref quelque chose de contextuel. Dans ce coup de crayon, on a l'esssence du projet. (sa nature intime).

Comment l'architecte peut-il convaincre les autres avec ces quelques traits sommaires ?
Tout simplement , je crois, grâce au  "Less is more" si cher à  Mies Van der Rohe.
Les traits essentiels ont plus de force que les plans détaillés. C'est ce que les publicitaires ont compris depuis longtemps : le logo le plus simple est le plus représentatif, le plus explicite.
Et puis, autre atout non négligeable : l'esquisse laisse le champs libre à l'imagination, tout semble possible, chacun peut s'y projeter, chacun peut se l'approprier. - le thème de l'appropriation (en tant que vécu) de l'architecture serait d'ailleurs à développer - 

Cela étant dit, chacun sait que l'élaboration d'un projet est longue (des années), doit intégrer une foultitude de contraintes ( contrainte de programme souvent mal exprimé,contraintes réglementaires, techniques, de mise en oeuvre, financières, relationnelles, ... ). La tentation est grande de complexifier, d'en rajouter au passage.
Mais alors,  comment font ces architectes pour que toutes les contraintes inhérentes à la conception architecturale et au process de "fabrication" n'entament pas, ne dénaturent pas leur première esquisse ?
Comment font-ils pour s'en tenir à ( ou au moins toujours y  revenir ) à la base (car c'est la clé) ... sans superflu .
Ils gardent en eux cette intuition de départ, ce geste primitif, pendant tout le déroulé du projet, comme un guide, comme des rails, pour ne pas dévier du but. 


Ca semble si simple, et c'est pourtant si difficile. 
Comme le marin tient bon la barre contre vents et marées.
Comme la danseuse enchaîne les pirouettes avec légèreté alors que ses orteils sont en sang dans leur pointes.
L'architecture réussie ( comme la régate ou la chorégraphie) ne  transpire pas la souffrance, elle est le juste reflet de la beauté de ce premier geste (la beauté s'entend bien sûr non par la perfection du dessin mais bien par l'évidence qu'il suggère) .


Car, enfin, à la réalisation , on ne peut que s'exclamer : 



Que c'est beau cette cohérence !





Les illustrations parlant forcément d'elles-mêmes (et bien mieux que l(m)es mots ) voici quelques esquisses nées de ces gestes primitifs et leur réalisations. Regardez, détaillez, vous verrez que tout y était déjà ...

L.







Oscar Niemeyer




Shigeru Ban






Frank Gehry




Christian de Portzamparc






Santiago Calatrava




Tadao Ando





Le Corbusier



Kenzo Tange

jeudi 6 novembre 2014

A l'encre de ton cerveau

"Hay una preciosa imagen que creo que es capaz de sintetizar todo lo que propongo: un expresivo dibujo de Jørn Utzon, el maestro, que muestra una persona que para escribir ¿dibujar? moja la pluma en el tintero de su abierta cabeza. Alguien que escribe-dibuja-construye con la cabeza, con la tinta de la razón. Alguien, el arquitecto, que construye ideas." *
Alberto Campo Baeza






* que je traduirais par :

"Il y a une image précieuse que je crois capable de synthétiser tout ce que je propose : un dessin expressif de Jørn Utzon, le maître, qui montre une personne qui, pour écrire (ou dessiner ?) trempe la plume dans l'encrier de sa tête ouverte. Quelqu'un qui écrit , dessine, construit avec la tête, avec l'encre de la raison. Quelqu'un, l'architecte, qui construit des idées."

dimanche 26 octobre 2014

L'oeil et la manière

" All eyes are basically the same, it is the way in wich you look through them that counts. "


lettre retrouvée de Tim. P. 1997


jeudi 23 octobre 2014

Illusion

Jamie Harkins , oeuvre éphémère



Escher




" C'était il y a très, très, très longtemps, en ce temps-là il y avait le Ciel. Au milieu du Ciel, il y avait la Terre qui était ronde et qui tournait. A gauche du Ciel il y avait la Planète Shadok. Elle n'avait pas de forme spéciale...
ou plutôt.... elle changeait de forme, ce qui était très inconfortable pour les Shadoks qui y habitaient. 
Ils ne savaient plus quels étaient les escaliers qui montaient et ceux qui descendaient sauf quand c'était expressément écrit dessus. Alors il arrivait souvent qu'avec un escalier prévu pour la montée on réussisse à monter plus bas qu'on ne serait descendu avec un escalier prévu pour la descente.
De même, quand ils montaient un escalier, ils n'étaient jamais sûrs d'arriver en haut."


Les Shadocks, Jacques Rouxel.

mercredi 22 octobre 2014

Philosopher ou faire l'amour


Dans un essai iconoclaste, Ruwen Ogien déconstruit tous les stéréotypes accumulés depuis Platon sur l’amour. Un livre jouissif qui invite à élargir les territoires potentiels de l’amour plutôt qu’à le réduire à des chansons usées.


L’amour a la cote, surtout auprès des philosophes, qui ne cessent aujourd’hui encore de le glorifier, d’Alain Badiou à Luc Ferry, d’André Comte-Sponville à Alain Finkielkraut… Il existe une prolifération d’éloges philosophiques de l’amour. Quoi de plus normal ? Qui oserait nier cette idée ancrée en nous comme une évidence absolue qu’il n’y a rien de plus beau, vital, déchirant et intense que l’amour dans une existence ? Personne. Eh bien si, un philosophe, justement, Ruwen Ogien, très sceptique face au champ de l’amour, mais excité par les chants d’amour.

Son nouvel essai, Philosopher ou faire l’amour, s’évertue à démontrer, comme le chante Brigitte Fontaine, que “l’amour, c’est du pipeau, c’est bon pour les gogos”. On retrouve tout au long de sa réflexion des extraits de chansons populaires, de Céline Dion à Sexion d’Assaut, de Françoise Hardy à Stromae, dont les phrases parfois sans queue ni tête invitent à réfléchir autrement sur l’amour. Qu’elles soient gaies ou tristes, toutes révèlent, par leur sincérité parfois puérile, la réalité d’un imaginaire amoureux que Ruwen Ogien interroge à la lumière de son “mauvais” esprit. De manière en apparence légère et joyeuse, mais au fond très conceptuelle.

Les six idées de base de l’amour

Pas à pas, l’auteur déconstruit subtilement les présupposés de l’amour romantique, en s’intéressant “avant tout aux problèmes logiques et moraux que posent les idées de base de l’amour”, pour briser l’illusion de l’idée dominante consistant à faire de l’amour “une sorte d’exception par rapport aux autres questions existentielles sans proposer de justification solide à ce traitement sélectif”. Fidèle à son mode de réflexion, attaché à dénoncer le paternalisme moral ambiant et toutes les polices morales en action, Ogien s’en tient à des principes logiques. Son “éthique minimale” lui sert de cadre pour évaluer la validité des “six idées de base de l’amour” : l’amour est plus important que tout, l’être aimé est irremplaçable, on peut aimer sans raison, l’amour est au-delà du bien et du mal, on ne peut pas aimer sur commande, l’amour qui ne dure pas n’est pas un amour véritable.

Discutant chacun des points, l’auteur analyse combien l’idéal amoureux romantique est en fait défectueux “non parce qu’il est irréalisable mais parce que ses idées de base sont moralistes et conceptuellement infondées”. On peut tout à fait aimer quelqu’un sans l’admirer, en méprisant profondément son caractère. On peut aussi aimer quelqu’un sans supporter sa présence. De même, l’amour qui ne dure pas peut être un amour véritable… Ogien s’écarte du Banquet de Platon, texte fondateur sur l’amour absolu, conférant au philosophe le rôle crucial de contribuer à une ascension vers un amour céleste ; comme si l’amour physique ne pouvait à lui seul définir un amour véritable.

Si vous philosophez, suggère Platon, vous comprendrez l’intérêt de l’amour moral. D’où le dilemme, posé par Ogien de manière ludique, en clin d’œil au film des frères Larrieu, Peindre ou faire l’amour : philosopher ou faire l’amour ? Or, contre Platon et tous ses héritiers, Ogien pense qu’il n’existe “aucune bonne raison philosophique de dévaloriser l’amour physique et de survaloriser l’amour romantique”. Combattre le moralisme, c’est s’élever contre “la volonté de privilégier une certaine conception du bien et de la perfection humaine”, tournée vers des accomplissements spirituels au détriment de tous les autres, notamment corporels.

Grosses couches moralistes

Sans cynisme aucun, en triturant ses arguments logiques et en déconstruisant les grosses couches moralistes qui recouvrent les discours égarés sur l’amour, Ruwen Ogien ne propose pas pour autant d’idée définitive sur l’amour.

L’amour nous échappe toujours un peu, à la fois humainement et conceptuellement. Définir l’amour n’a d’ailleurs jamais été son projet, comme il reste impossible de définir absolument le bien, le mal, la vérité, la beauté… Il préfère laisser au lecteur la liberté de chercher une définition originale, tout en estimant que “ce serait une mauvaise idée d’essayer”.

Ce qui importe, c’est de saisir qu’une “conception non essentialiste” de l’amour n’impose rien de fixe, d’éternel, d’universel, afin de laisser à toutes les innovations pratiques la possibilité de se déployer. Les éloges actuels de l’amour, qui se présentent comme une forme de dépassement de soi vers l’autre, partagent ce défaut majeur, selon l’auteur : ils masquent le fait que “l’éloge de l’amour est devenu un genre qui exprime la pensée conservatrice qui sévit désormais à droite comme à gauche” et sert à“justifier le refus de toute innovation normative en matière de mariage, de sexualité ou de procréation”.

La plus juste façon d’aimer l’idée de l’amour, c’est de la laisser se déplacer, pour ne pas la réduire à une certaine conception de la perfection humaine, forcément partielle et imparfaite. Ce déplacement souhaité permettrait de substituer un “et” à un “ou”, pour affirmer avec l’auteur : philosopher et faire l’amour.



Article de Jean-Marie Durand, paru le 21/10/2014, dans les Inrocks, Un essai déconstruit tous les stéréotypes de l'amour, à propos de Philosopher ou faire l'amour de Ruwen Ogien

Article complet là :  les Inrocks,21/10/2014





dimanche 19 octobre 2014

Tête-bêche










Jean-Pierre BRAZS 

Installations photographiques / Château de Plaisir, Yvelines / 
dans le cadre du Festival "Escales d'ailleurs 2009" / 13 juin 2009


samedi 18 octobre 2014

Lier Entrelacer Ecrire


"Notre monde a besoin de bons lecteurs, sans doute encore 
davantage que de bons écrivains. Il en va ici des paysages 
comme des livres : la lecture précède nécessairement 
l'écriture qu'elle irrigue et nourrit. A regarder les interventions
paysagères de Jean-Pierre Brazs, on devine tout de suite 
qu'on a affaire à un grand lecteur du paysage – un promeneur 
tranquille, un regardeur qui plonge dans le lieu qui l'accueille 
et qui prend le temps d'en faire la lecture, avant d'en proposer 
sa relecture singulière sous la forme d'une œuvre qui vient 
prolonger ce lieu et rendre un hommage discret à tout ce qui a 
pu combler son regard de lecteur. Il suffit parfois d'un seul 
point de vue sur le monde pour qu'il prenne forme : dans son 
intervention sur le site, il est question d'ordre et de désordre,
mais aussi de réalité et d'apparence. Car rien ne ressemble 
plus au désordre qu'un ordre qui s'organise : pourvu qu'on 
ouvre l'oeil, Le jardin du cercle d'or nous le donne à voir sous
la forme d'une étrange anamorphose qui confronte
l'entremêlement chaotique d'un amoncellement de branches à 
la rigueur géométrique du cercle parfait. De loin, on voit juste 
un tas de branches posé sur une dalle circulaire de béton. 
Mais en s'approchant, le visiteur découvre dans ce désordre 
apparent des traces de dorure ; en se déplaçant autour de
l'assemblage, les taches brillantes se rassemblent ; une forme 
incertaine apparaît qui l'encourage à se placer au point focal 
de l'anamorphose, signalé par une marque au sol : alors 
seulement le cercle d'or se (re)constitue et s'imprime sur la 
rétine du visiteur – car ce qui est vu n'existe pas ailleurs que
dans le regard que l'on pose sur le tas de branches, à cet 
endroit précis. Jean-Pierre Brazs s'amuse à duper notre 
regard : il nous invite à nous déplacer et à nous orienter pour 
découvrir le seul point de vue où il nous faut chaque fois nous 
placer pour découvrir le cercle parfait qui émerge ainsi de ce 
qui, au premier coup d'œil, n'était qu'un chaos disparate. Ce 
cercle semble ovale parce que notre cerveau et la vision 
binoculaire corrigent l'effet purement optique. Mais Il suffit de 
fermer un œil pour que le cercle parfait apparaisse – et si vous
fermez les deux yeux pour prolonger le plaisir, vous le verrez 
peut-être voyager, comme un éclat de soleil illumine la nuit qui 
tombe en taches noires sous nos paupières baissées."

François de Coninck
Extrait de « Lier, entrelacer, écrire : un autre regard sur le site »







dimanche 12 octobre 2014

Ne lui dis pas

Troubles images issues du temps
Messages d'enfant
Vagues voyages au gré d'avant

Ne lui dis pas
Ce n'est qu'à  toi
Rêve tout bas
Ne lui dis pas

Tendres caresses, fièvres et sang
Les peaux s'entendent et se tendent
Paupières closes, qui te prend ?

Ne lui dis pas
Ça sert à  quoi
Ce n'est qu'à  toi
Ne lui dis pas

On n'avoue rien si l'on est innocent
Les mots sont vains, les mystères indulgents
La pénombre éclaire
Du silence au mensonge
C'est l'espace des songes

Page après page, vie sur vie
Quand les questions dansent
N'est-ce que ça ? Etait-ce lui ?

Ne lui dis pas
Ce n'est qu'à  toi
Rêve plus bas
Ne lui dis pas

Qu'il est si tard, qu'il ne t'étonne plus
Qu'il ne sait pas et qu'il n'a jamais su
Que bientôt l'hiver
Si c'était à  refaire
Mais...


J-J Goldman

jeudi 9 octobre 2014

Ombre

Photographie de et avec L.









" Nous ne pouvons vivre que dans l’entrouvert, exactement
sur la ligne hermétique de partage de l’ombre et de la lumière. Mais nous
sommes irrésistiblement jetés en avant." 
René Char

 " ... l’équilibre entre ces deux forces contraires, l’accomplissement de l’expérience poétique..."
Georges Séféris

 " Je sais seulement que je dois vivre avec la lumière."
Georges Séféris





Se fondre ...

Photographie de et sans L.



Remarquez-vous la même chose que moi ?
Elle s'est assise là, évidemment - pour moi (et pourtant sûrement inconsciemment pour elle). 
Se "fondre" ... dans le décor !